C’est le début d’après midi lorsque nous arrivons au monastère d’Aghpat. Evidemment en ce milieu du mois de décembre, le lieu est quasi désert.
Alors que nous nous promenons sur le site je salue un prêtre qui passe dans les lieux. La conversation s’engage et je découvre avec surprise qu’il connaît très bien Norvan Zackarian, l’ancien archevêque de Lyon qui m’a donné des cours de catéchisme lorsque j’étais plus jeune.
Il nous propose de nous faire la visite ce que nous acceptons. Mais plus intéressant encore que la visite, il nous invite à prendre le thé chez lui. Nous remontons dans le village de Aghpat, adossé au monastère. Il habite une grande demeure qui appartient à l’église. Il l’a en partie réaménagé en dortoirs afin d’accueillir les voyageurs de passage.
L’endroit est très simple mais propre. Des lits de camps militaire soigneusement alignés, des toilettes propres elles-aussi avec l’eau avec l’eau chaude ce qui est assez rare pour être mentionné.
Nous finissons dans les quartiers privés du prêtre. Sa chambre en fait, elle aussi très simple. Il nous explique qu’il vient de Beirut et qu’il a fait son séminaire à Jérusalem. L’instant que nous partageons est intense car doucement le prêtre au long manteau noire et au chapeau de fourrure qui lui donne cet air si sérieux se dévoile peu à peu. Bien sur c’est un homme d’église, mais c’est avant tout un homme. Autour du thé, il nous explique qu’il a été nommé à Aghpat il y a 2 ans. C’est un poste prestigieux, mais qu’il est maintenant très impatient d’être relevé de ses fonctions afin de partir vers de nouvelles latitudes.
Il est assis en face de nous, en pantalon de velours. Au milieu de la pièce se dresse un grand poêle à bois qui sépare la pièce en deux. Il sert à se chauffer et cuisiner. Il est en charge d’un des plus prestigieux monastère d’Arménie, celui ou Sayat Nova a vécu et travaille pendant prêt de 20 ans. Pourtant c’est de manière très modeste, dépourvu de moyen qu’il vit. Sa vision de l’Arménie est assez critique : manque d’initiatives, manque de motivations, peu d’esprit d’entreprise… La critique est acerbe. Est-elle faite sous le fait de la lassitude d’être ici, loin de sa famille et très isole ? Peut-être, mais peut-être aussi à travers ces propos transparait aussi une part de vérité…
Je ne peux m’empêcher de lui demander avant de le prendre en photo. Bien qu’obligatoire, cette question vient briser cette intimité qui s’est installé et il se lève pour renfiler sa robe noire. Il doit garder des apparences distantes.
Nous repartons de chez lui après qu’il nous ait présenté son chien « chounig ». Un brave bâtard qui court dans tous les sens dans la cour de la maison. C’est sa seule compagnie et le reste de sa famille est partagée entre le Liban et les Etats-Unis. Beaucoup de solitude chez cet homme qui subit visiblement plus qu’il ne choisit sa prestigieuse mission à Aghpat.
Nous repartons après avoir fait un détour par le Jamadoun d’ou nous voyons sonner les cloches. Nous mettons la direction sur le monastère jumeau de Sanahin. Il fait face à celui de Aghpat dont il est l’ainé.
Là-bas pas de prêtres, mais un groupe de 5 personnes qui ont dressé une table à coté de laquelle ils ont posé une banquette de camion qui fait office de banc. Ils travaillent sur l’une des pierres tombales du cimetière adossé au monastère, et profite de la fin de la journée pour partager quelques verres en mangeant un bout.
La conversation s’engage naturellement et nous nous retrouvons à trinquer avec eux. Après plusieurs pajags levés à la santé des villageois, des voyageurs, des Zackarian (famille princière enterrée à Sanahin) et de tout ce qui nous passe par la tête, nous reprenons enfin la route.
Nous passons la ville d’Alaverdi, lovée dans une vallée, et traversons les épaisses fumées que l’immense cheminée de l’usine d’extraction de cuivre Vallex déverse dans la vallée. La relance économique demande quelques arrangements écologiques…
Et le pêle-mêle photo qui va bien
important Sayat Nova a passé son enfance à Sanahine et a été assassiné à Haghpat . le film de Paradjanov “la couleur de la grenade” a été tourné dans les sites culturels d’Alaverdi….dernière nouvelle l’usine est fermée….
important Sayat Nova a passé son enfance à Sanahine et a été assassiné à Haghpat . le film de Paradjanov “la couleur de la grenade” a été tourné dans les sites culturels d’Alaverdi….dernière nouvelle l’usine est fermée….
Bonjour, merci pour ces precisions intéressantes. Je vais essayer de trouver ce film dont j’ai beaucoup entendu parler mais que je n’ai jamais eu l’occasion de voir.
Concernant l’usine, c’est surement une bonne chose pour la santé publique; par contre l’impact économique est surement dur pour la région.
Pouvez-vous m’indiquer de quand daterait cette fermeture?